Questions au sujet de la norme

La norme sur la protection des personnes vulnérables a été conçue par un groupe pancanadien de conseillers possédant une expertise en médecine, déontologie, droit, politiques publiques et besoins des personnes vulnérables. Elle représente également le point de vue commun de nombreuses organisations communautaires et de santé de renom du Canada. Pour en apprendre davantage au sujet de la Norme, de son rôle et de son incidence, lisez les questions et réponses ci-dessous.

 

1.     Qu’est-ce que la vulnérabilité? Qui d’entre nous est vulnérable?

Être vulnérable, c’est avoir des facteurs de protection faibles, nous rendant ainsi plus enclins à subir des préjudices. De nombreux Canadiens et Canadiennes ont la chance d’avoir des facteurs de protection que nous pouvons tenir pour acquis : nourriture et logement sécuritaire; revenu, éducation et soins de santé adéquats; famille et amis; des lois et politiques qui nous protègent et défendent nos intérêts. Malheureusement, ce n’est toutefois pas le cas de tous les Canadiens et Canadiennes.

Les recherches démontrent que ces types de facteurs de protection – souvent appelés les déterminants sociaux de la santé – ont une influence importante sur notre santé et notre bien-être. Les personnes qui ont un accès restreint à ces facteurs de protection sont plus à risque de devenir malades, de souffrir et d’avoir une espérance de vie réduite.

Des facteurs psychosociaux, comme le deuil, la solitude et la stigmatisation, peuvent également contribuer à la vulnérabilité d’une personne. Une personne peut également être davantage à risque d’être incitée ou contrainte à demander l’aide médicale à mourir. Il est donc essentiel que ce risque soit pris en compte par une Norme sur la protection des personnes vulnérables.

La vulnérabilité peut compromettre l’autonomie de façon souvent difficile à détecter. La Norme sur la protection des personnes vulnérables fournit des repères pour évaluer l’efficacité des mesures de protection servant à prévenir des préjudices potentiels créés par l’accès à l’aide médicale à mourir.


2.     Pourquoi la norme est-elle importante?

La Norme sur la protection des personnes vulnérables trouve son fondement dans la conclusion de la Cour suprême du Canada qu’un « régime de réglementation bien appliqué permet de protéger les personnes vulnérables contre les abus ou les erreurs ».


Les personnes qui demandent l’aide médicale à mourir peuvent le faire pour des raisons qui n’ont aucun lien avec leur maladie ou leur pronostic. Ces facteurs peuvent mener certaines personnes vulnérables à demander l’aide médicale à mourir alors que ce qu’elles veulent vraiment – et ce qu’elles méritent – est d’avoir accès à de meilleurs traitements, au respect, à des soins palliatifs de qualité et à tout autre service qui répond mieux à leurs besoins. La Cour suprême du Canada a reconnu cette réalité. Même si la Cour a conclu que la prohibition absolue de l’aide au suicide enfreint le droit à l’autonomie d’une personne souffrante dans certaines situations, elle a également constaté que toute exception à cette prohibition pourrait rendre certaines personnes vulnérables aux abus et aux erreurs. Par conséquent, l’accès à l’aide médicale à mourir doit être réconcilié avec nos obligations morales et constitutionnelles de protéger les plus vulnérables d’entre nous qui ont des besoins non comblés.


3.     La norme limite-t-elle l’accès à l’aide médicale à mourir à ceux qui sont en fin de vie?

Oui. La Cour suprême du Canada a retenu que les adultes qui « pourraient être à risque de se suicider dans un moment de faiblesse » doivent être protégés.

Dans l’arrêt Carter, la Cour suprême a adopté le vocabulaire utilisé par le tribunal inférieur. Le terme légal « grave et irrémédiable » a été défini par le tribunal inférieur dans ses conclusions comme une « déchéance avancée des capacités », « sans perspective d'amélioration ». Lorsqu’elle a accordé une exemption constitutionnelle à la loi interdisant le suicide assisté à Gloria Taylor, la juge de première instance a déclaré que l’aide médicale à mourir était justifiée uniquement quand un adulte était « en phase terminale et mourant, et qu’il n’existe aucun espoir de guérison ». Les critères ont été intentionnellement restreints à la fin de vie sans espoir de rétablissement afin de protéger les personnes vulnérables qui pourraient manquer de soins et de soutien.

Ainsi, dans le cas des personnes qui ne sont pas en fin de vie, mais qui souffrent de façon persistante et intolérable, nous devons considérer que la demande d’aide médicale à mourir constitue une expression de leur vulnérabilité; c’est-à-dire un niveau intolérable de besoins non comblés qui exige une action.


4.     La norme sur la protection des personnes vulnérables s’accorde-t-elle avec l’arrêt de la Cour suprême dans l’affaire Carter?

Oui. La Norme sur la protection des personnes vulnérables s’accorde entièrement avec l’arrêt de la Cour suprême dans l’affaire Carter. Plus précisément, la Norme remplit l’exigence élevée qu’impose la Cour, qui a pour objectif de s’assurer que nul ne pousse une personne vulnérable au suicide. Les experts en droit constitutionnel et en droit de la personne qui appuient la Norme sur la protection des personnes vulnérables s’entendent pour dire que d’adopter une telle Norme constitue un exercice légitime de l’autorité législative, en cohérence avec le principe constitutionnel de dialogue entre les tribunaux et les législatures.

Il a été dit que l’arrêt Carter établit un « plancher » ou une norme minimale que toute loi qui porte sur l’aide médicale à mourir au Canada doit respecter. Certains croient que les énoncés généraux de l’arrêt ne devraient pas être précisés et que les critères qui gouvernent l’accès à l’aide médical à mourir ne devraient pas limiter un droit absolu d’accès à cette aide. Cette interprétation ne devrait pas faire obstacle. Ni l’arrêt Carter ni la Charte canadienne des droits et libertés ne devraient être interprétés de façon à rendre les personnes vulnérables davantage à risque. Si l’arrêt Carter établit un plancher, il faut bâtir sur ce plancher pour mettre en place des mesures robustes et efficaces de protection des personnes vulnérables.


5.           Comment saurons-nous que la maladie qui affecte le patient est « grave et irrémédiable »?

Deux médecins doivent rencontrer et évaluer le patient de manière indépendante et conclure que la maladie dont il est atteint est grave et irrémédiable, car elle impose « une déchéance avancée de ses capacités », sans « aucune perspective d’amélioration ». Les deux médecins doivent aussi, indépendamment, conclure que le pronostic du patient est qu’il est en fin de vie.


6.     Comment saurons-nous si la personne qui demande l’aide médicale à mourir est vulnérable en raison de facteurs non médicaux?

En collaboration avec les médecins du patient, une équipe de soins pluridisciplinaire fournira de l’expertise au sujet des causes physiques, psychosociales et spirituelles de la souffrance ainsi qu’au sujet des autres traitements et services offerts. Cette équipe sera à l’écoute des risques d’incitation ou de contrainte dans le cadre d’une évaluation complète de la vulnérabilité.


7.     Qu’est-ce qu’une « évaluation de la vulnérabilité » et pourquoi est-elle requise?

Une évaluation de la vulnérabilité est une occasion pour des professionnels de la santé et des services sociaux qualifiés d’examiner attentivement toutes les conditions relatives aux déterminants sociaux de la santé et aux facteurs psychosociaux qui peuvent sous-tendre ou accroître la souffrance d’une personne.

Les études montrent que les adultes qui demandent l’aide médicale à mourir peuvent être motivés par des facteurs qui sont distincts de leur maladie terminale. Ces facteurs comprennent le jugement altéré, la crainte de perdre son autonomie, l’inquiétude par rapport au stress subi par leurs proches aidants, la honte par rapport à leur situation, ainsi que la contrainte directe ou indirecte par d’autres individus. Une personne qui a été dépossédée de ses pouvoirs ou qui a été intimidée par des figures d’autorité dans sa vie peut également être indûment influencée; par exemple, par ce qu’elle croit que le médecin ou un membre dominant de sa famille désire qu’elle fasse.

Les évaluations de la vulnérabilité sont requises pour évaluer si ces circonstances ou autres contribuent au désir de mourir du patient. Le processus d’évaluation devrait viser à atténuer ces conditions en s’attaquant aux sources de la vulnérabilité.

Une évaluation efficace de la vulnérabilité devrait être menée de façon à ouvrir les portes et à éliminer les obstacles, offrant d’autres options qui peuvent accroître la résilience et le bien-être d’une personne.


8.           La norme permettrait-elle aux patients qui sont atteints d’une souffrance morale ou d’un trouble psychologique grave et persistant de demander l’aide médicale à mourir?

Si le patient est capable de donner un consentement libre et éclairé et qu’il souffre d’une maladie terminale « grave et irrémédiable » qui, selon l’avis de deux médecins, cause des souffrances persistantes, incluant une souffrance mentale ou un trouble psychologique, le patient pourrait être éligible. Cependant, la souffrance mentale et le trouble psychologique ne sont pas en soi des maladies qui mènent à la fin de vie et donc ne pourraient pas fonder à eux seuls une demande valide d’aide médicale à mourir.


9.     La norme permet-elle aux mineurs d’avoir accès à l’aide médicale à mourir?

Non. L’arrêt de la Cour suprême a limité de manière explicite l’accès à l’aide médicale à mourir aux adultes répondant à tous les critères spécifiés. La norme est entièrement en accord avec la déclaration de la Cour et permet ainsi le respect des vulnérabilités propres aux jeunes.


10.  La norme permettrait-elle aux personnes qui souffrent de déficience développementale, intellectuelle ou cognitive de demander l’aide médicale à mourir?

La déficience développementale, intellectuelle ou cognitive ne constitue pas en soi une maladie qui mène à la fin de vie et ne serait donc pas éligible.


11.  Pourquoi la norme interdit-elle aux adultes de demander l’aide médicale à mourir par des directives préalables?

La Cour suprême a conclu qu’une personne doit avoir la capacité de donner un consentement libre et éclairé à l’aide médicale à mourir si elle subit des souffrances persistantes et intolérables « au regard de sa condition ». Les directives préalables sont mises en œuvre à une date indéterminée, quand une personne n’a plus la capacité juridique de prendre des décisions par rapport à sa personne.

Une demande d’aide médicale à mourir doit être motivée par l’expérience personnelle et subjective d’une souffrance intolérable de la personne. La prédiction de souffrances futures n’est pas fiable. Des études sur la psychologie humaine indiquent que les gens prédisent généralement de façon incorrecte le degré de souffrance qu’ils ressentiront à la suite d’événements futurs. Lorsqu’une personne n’est plus en mesure de décider si sa souffrance est si grande qu’elle doit se tourner vers l’aide médicale à mourir, des directives préalables feraient en sorte que d’autres décideurs devraient évaluer le degré de souffrance de la personne. Bien qu’il soit possible de déterminer objectivement la cause de la souffrance d’une personne, l’évaluation du degré ou de la nature de la souffrance d’une personne ne peut être que subjective. Accorder le droit à d’autres de décider si une personne atteinte d’une déficience cognitive souffre suffisamment pour justifier une aide médicale à mourir exposerait trop de personnes vulnérables à un risque d’abus et d’erreur, particulièrement aux erreurs basées sur la stigmatisation, les stéréotypes ou les préjugés.

Les directives préalables ne peuvent satisfaire à l’exigence imposée par la Cour suprême : qu’une personne doit subir des souffrances persistantes qui sont intolérables « au regard de sa condition ». Cette condition, la façon dont la personne y réagira et les options qui pourraient être offertes à ce moment-là ne peuvent pas être prédites.


12.  Pourquoi la Norme exige-t-elle que la demande d’aide médicale à mourir soit examinée par un juge ou une commission indépendante d’experts?

L’autorisation par un juge ou une commission indépendante d’experts vise à assurer que la demande du patient est bien conforme aux exigences nécessaires pour obtenir la participation légale d’un médecin à l’aide médicale à mourir.

L’autorité s’assurerait que l’évaluation de la vulnérabilité du patient a été effectuée, que deux médecins ont accepté la demande et rempli leurs obligations en vertu de la loi, et que toutes les mesures possibles ont été prises pour réduire les risques d’abus et d’erreur.


13.  Serait-il possible de faire appel de la décision du juge ou de la commission indépendante d’experts?

Oui. Les patients dont la demande est rejetée pourront faire appel auprès du tribunal approprié de leur province ou territoire.


14.  Existe-t-il des modèles de commissions indépendantes d’experts?

Oui. Les provinces et territoires ont tous divers mécanismes indépendants qui statuent au sujet des décisions sur les soins, du consentement éclairé, de l’admission en cure obligatoire, des mandataires spéciaux, de la divulgation des renseignements personnels sur la santé et du dépistage obligatoire par test sanguin.

Par exemple, la Commission du consentement et de la capacité de l’Ontario a examiné plus de 3 500 requêtes touchant ces questions en 2014-2015. La Commission compte plus de 120 membres qui prennent des décisions en son nom.

De plus, chaque province et territoire a une Commission d’examen constituée en vertu du Code criminel, qui a le mandat de prendre des décisions en matière de détention des personnes qui sont soit inaptes à subir leur procès, soit en non-responsabilité criminelle.

Ce sont là d’excellents modèles et ils offrent une base pour créer un système d’autorisation indépendant crédible pour l’aide médicale à mourir dans chaque province et territoire.


15.  L’exigence que les demandes soient autorisées indépendamment impose-t-elle un fardeau indu aux personnes qui souffrent en fin de vie?

Non. L’expérience des autres commissions et tribunaux mentionnés ci-dessus indique que les procédures peuvent se dérouler de façon accélérée dans le respect de la fragilité de la santé et des autres circonstances du demandeur.


16.  Pourquoi la disponibilité des services d’interprétation est-elle importante?

Il est essentiel que les patients face à une malade terminale puissent bien comprendre les options qui leur sont offertes et en discuter. Les patients doivent avoir accès à des services d’interprétation neutres, indépendants et professionnels, incluant l’ASL/anglais, la LSQ/français de même que l’interprétation culturelle et autres arrangements nécessaires au soutien de la prise de décision.


17.  La norme s’accorde-t-elle avec le droit international?

Dans son examen de 2011 du rapport des Pays-Bas sur le Pacte international relatif aux droits civils et politiques, le Comité des droits de l’homme de l’ONU a exprimé une préoccupation quant au fait que le suicide assisté et l’euthanasie aux Pays-Bas n’étaient assujettis qu’à un « contrôle ex post [facto], qui ne peut prévenir l’interruption de la vie lorsque les conditions obligatoires ne sont pas respectées ». Dans son rapport de 2009, le Comité a répété qu’il « reste préoccupé… [parce que] même s’il faut l’avis d’un second médecin, un médecin peut mettre fin à la vie d’un patient sans que la décision ne fasse l’objet d’un examen indépendant conduit par un juge ou un magistrat pour s’assurer qu’elle n’est pas le résultat de pressions morales ou d’une mauvaise appréciation ».

Comme les Pays-Bas, le Canada s’est engagé à respecter ses obligations en vertu du Pacte qui a été ratifié en 1976.

Le Canada a également ratifié la Convention relative aux droits des personnes handicapées de l’ONU dont l’article 10 exige la protection du droit à la vie des personnes handicapées et l’article 16 demande la protection de ces personnes contre l’exploitation et la maltraitance. Les Nations unies évaluent actuellement la conformité des lois canadiennes avec ces articles; leur rapport au sujet des politiques du Canada en matière d’aide médicale à mourir est attendu en 2017.


18.  Qui a conçu cette norme?

Cette norme a été conçue par un groupe de conseillers possédant une expertise en médecine, déontologie, droit, politiques publiques et besoins des personnes vulnérables. La liste complète des conseillers qui ont travaillé à la conception de la Norme se trouve ici.

Veuillez noter que certains des conseillers qui ont contribué à la conception de la Norme ont des objections éthiques et morales à l’euthanasie et au suicide assisté, mais qu’ils appuient cette Norme pour aider à limiter les préjudices et les risques qu’ils présentent, particulièrement pour les personnes vulnérables.


19.  Qui appuie cette norme?

Une liste des organisations qui appuient cette Norme se trouve ici.

Veuillez noter que certaines des personnes et des organisations qui ont appuyé la Norme ont des objections éthiques et morales à l’euthanasie et au suicide assisté, mais ils appuient cette Norme pour aider à limiter les préjudices et les risques qu’ils présentent, particulièrement pour les personnes vulnérables.


20.  Comment cette Norme doit-elle être utilisée?

Cette Norme constitue un outil pour les législateurs fédéraux, provinciaux et territoriaux, servant de guide quant aux modifications à la loi et aux politiques de manière à assurer que le système d’aide médicale à mourir est conçu pour protéger les personnes vulnérables. Cette Norme sert également de ressource pour les groupes de société civile et les ordres professionnels qui cherchent à concevoir et promouvoir des mesures de protection solides qui aideront à protéger les personnes vulnérables au sein du système.


21.  Où puis-je trouver davantage de renseignements sur cet enjeu?

Pour obtenir de plus amples renseignements, visitez l’onglet « Nouvelles et ressources » du menu et cliquez sur les liens des organisations qui ont exprimé leur soutien envers la Norme sur la protection des personnes vulnérables.

 



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